dimanche 10 février 2019























Déréliction :

Surmonté chichement
D'un chèche enturbanné ,
En manière de coiffe,
Dans mon désert affectif, 
Improbable bédouin, 
Je promène ma soif,
Au rythme lancinant
De mon camélidé.

jeudi 7 février 2019





Dans son testament autographe, 
le divin marquis Donatien- Alphonse- Ferdinand de Sade, 
demanda que l’on semât sur sa tombe,
des glands.

Cela ne s’invente pas..


Ennemi héréditaire
(Il faut savoir apprécier son ennemi)

"Il y a une certaine différence entre les français et les anglais.
Par exemple le français :
–Parle à un inconnu sous prétexte qu’il est en voiture (souvent d’ailleurs avec une notable grossièreté..)
–Sort sans parapluie, sous prétexte qu’il ne pleut pas.
–Parle aux arbres dès qu’il est à la campagne.
–Gruge pour passer devant les autres dans la file d’attente. 
-Se dépêche de raccrocher au lieu de s’excuser quand il se trompe de numéro.

–etc...


Un français sans maîtresse
c’est comme un anglais sans club.



En Angleterre, rien n’est fait pour les femmes. 
Les females, endurcies par les sports, se voient enlever leur époux par le club, leurs enfants par le collège, leur charme par la confection et, 
ce n’est pas avec la cuisine, qu’elles vont pouvoir se rattraper..



Tour de France :
Il s’agit de se rendre à Paris à bicyclette, le plus rapidement possible, tout en empruntant des chemins de plus en plus compliqués."



« Il se caressait la barbe, 
comme s’il y cherchait l’inspiration,

ou des miettes de pain.. »



Ce qui agite le monde et le fait avancer, 
c’est la cupidité.
Admettons qu’on l’éradique.
Qu’est-ce qui va la remplacer ?





"Il est plus aisé de légaliser certaines choses 
que de les légitimer."

(Chamfort)



Rime riche :

Deux vrais amis vivaient au Monomotapa*
Puis, l’un contourna l’autre, 
                                              et il se le tapa.

(*Que les zimbabwéens hétérosexuels me pardonnent..)




Belle, inaccessible, humide et toujours fuyante.
anguille ,
Anguille,
joli nom,
pour une fille..


Tu as beau être beaucoup plus belle que moi,
au sol,

nos ombres se valent.
On dit que le jour se lève. Le jour s'étend, 
progressivement, sur le ciel noir de la nuit ; 
c’est moi, qui me lève..



Trouvant chez sa maîtresse un homme, il lui dit : 
« sortez ! »
L'amant lui répond : 
« un gentilhomme aurais dit 
« sortons ! »



Il faut dire de quelqu’un : 
" c’est l’avant-dernier des imbéciles ", 
pour me décourager personne..


Il y a, en matière médicale, 
une connotation comminatoire dans le mot « ordonnance »
Il vaudrait mieux rédiger : « suggérance »..


L’orateur à son auditoire :
"si ceux qui discutent ou toussent, 
faisaient autant de bruit que ceux qui dorment, 
ça arrangerait ce qui m’écoutent."



Suggestion de tatouage intime* pour dames :
«Voi che entra qui, lasciate ogni speranza. »

* Je ne dis pas "rupestre", il ne faut rien exagérer..


J’ai peur, ma chère ,
quand tes yeux s’obscurcissent
comme la mer, 
soudain,
sous un grain.


Le vrai épicurien se méfie de l' Eros
car la pression dévoratrice conduit, 
de par l’impossibilité de la possession réelle, 
à la jalousie puis à la frustration. 
Il incite donc à l’objectivation réelle de l’être aimé et notamment de ses défauts.
Par exemple :
« Cette somptueuse créature a peut-être une haleine de fennec. »


La règle mystérieuse d’attraction- répulsion entre les masses se confirme de façon évidente, 
dans le "bal musette".*

*Les télescopages y sont rares !


J’aime inverser la supériorité qu’ont ceux, 
qui sont assis en terrasse, 
sur ceux qui passent,

en les regardant ostensiblement.

mercredi 6 février 2019

Vénus

C'est un "exercice littéraire".
Le thème: "zoom".
Il s'agit, feuilletant un livre illustré de grossir la focale sur une image et, de là, ...

Une heure que tu parcours ce bouquin.
Le Louvre, histoire, architecture et tout. Ca te rappelle l’école. 
Les livres chiants avec des images moches.
La visite du musée avec la prof. 
Les grandes salles mal éclairées, les parquets  
sur quoi les mômes sont assis par terre.
Ils sont harcelés par des institutrices, sèches comme des anglaises, qui les bombardent de questions à la noix sur : ce que le peintre a voulu représenter , la manière  etc.. dans ces immenses tableaux pendus au mur. 
Une BD géante.
Toujours la même histoire, religion, guerre, les deux à la fois souvent. 
De quoi se pendre, c’est vrai. 
Seul avantage, ils (elles..!) sont souvent à poil ; on rigole un peu. 
Sinon, une demi-heure pour raconter le naufrage de « La Méduse », ça craint ; 
ça vaut pas « Titanic ».
Puis, sur le point d’abandonner, au détour d'une page, une photo.
Ca y est, tu zoomes.
Une tache de couleur, comme un rêve "papillon" qui s’envolerait par la fenêtre de la classe. 
Un jardin embrumé, un parterre un peu fouillis, rebelle et, au milieu, une fleur épanouie, jaune et rouge qui illumine le livre au pied de la façade embrumée et sévère du Louvre.
Un clin d’œil du roi soleil qui semble te dire : « tu comprends pourquoi je me suis tiré à Versailles ? »
Une fleur, le Louvre ; ton cœur se met à battre ; 
"Bon sang, mais c'est bien sûr" ! 
Vénus !
Ça y est, cette fois tu rêves pour de bon. 
Tu es en classe.  
Tu a dix ans et des poussières. 
Pensionnaire ; école privée. 
Pas des curés, pire ; des cathos intégristes. 
Blouse grise, manchettes noires. Pupitre à rabat, encriers en faïence blanche. 
A côté du tableau noir, les grandes cartes de France ou de l'Afrique équatoriale Française.
L’encre violette est irrattrapable sur les chemises et les doigts ; même à la pierre ponce.
Dans le pupitre, la collection de scarabées. 
Et, dans ton bouquin d’histoire, une photo de la "Vénus de Milo".
Elle éclaire la page. 
C’est au Louvre, justement, qu'elle habite. 
Elle n’a pas de bras mais de vrais nichons. 
Enfin, en marbre, mais ce sont les seuls qui soient à portée de ton regard en 1954. 
Pas d’internet , "machinporn" ou quoi, à l’époque ; 
c’est du lourd.



Deux fois par semaine, c’est messe et catéchisme.
En rang par deux, intervalle d’un bras tendu. 
Un prof devant, un pion derrière et en route pour l’église.
Ta veste est déjà trop petite ; le pull tricoté par ta grand-mère pique, même à travers la chemise. 
Le pantalon est, lui aussi un peu court, ou alors, c'est un short. 
Les chaussettes en laine sont montantes et les souliers ont les bouts ronds et des crochets pour le laçage ; Il a  fallu les cirer, corvée interminable et obligatoire. 
Une boite spéciale, en bois, est dévolue à cet usage avec les brosses, le cirage Kiwi et  un chiffon de laine pour faire reluire. 
Ton numéro est écrit dessus et sur tous les habits. 
Pas sur l’avant-bras, mais c’est limite !
Si ça ne brille pas assez, on est pincé au gras du bras par la directrice, un rien sadique, qui filtre la montée au dortoir.
C'est sa façon de tripoter les mômes.
Le bleu qui en découle est le tatouage de l'époque qui s’effacera jusqu’à l'arrivée du prochain.
Pour l'heure, on se répand sur le trottoir sous le regard un peu goguenard des passants. On a un peu honte.
Certains ont même des bérets.
A l’église, on est séparé des filles. Pas qu’à l’église. 
Les filles, c’est un autre monde,  elles ont leur école : 
« Ecole de filles ». 
C’est marqué dessus. 
On ne les aperçoit que là, à la messe, et de loin.

C’est la préparation à la communion solennelle.

Elles alignent sur les prie-dieu, des profils de petites madones.

La première, c’est Vénus.

Sa peau est blanche, du lait.

Elle a des boucles blondes.

Les yeux baissés, elle semble prier.

Je suis jaloux du dieu qui à l’évidence pénètre son âme et lui intime la servilité.

Des pensées furieuses agitent mon sang.

Elle a posé sur moi deux yeux d’un bleu limpide et profond.

De l’eau.

Le sourire est là, hésitant, prêt à surgir.

Elle a re-baissé les yeux.

Ce sera tout pour aujourd’hui.
Tu es "amoureux"..!       
Tu l’appelles Vénus, mais elle ne le sait pas.
Un jour, tu as amené ton livre d’histoire, serré sur le ventre, à la messe. Tu lui a montré de loin la photo. Celle du musée du Louvre,
la "Vénus de Milo".

Toute la travée des filles a pouffé de rire. Elle a rougi. 
Ce jour là, à deux doigts de te faire gauler par le curé..
Depuis, pour toi, la corvée d’église : que du bonheur.
On échange  des regards, elle baisse les yeux, sourit. 
Avec l’harmonium derrière, on se croirait dans un film avec les mariés qui s’avancent vers l’autel dans un halo de brume lumineuse.
En fait,  c'est l'encensoir qui tient lieu de brume, et pas question de franchir l'allée qui te sépares de la travée du diable, la lumière rouge sur le tabernacle tient lieu de vidéo-surveillance.
Un claquement sec de bois de buis ou de mains te réveille. Tout le monde se lève. La colonne des filles se dirige vers la tache de lumière de la sortie suivie de celle des garçons.
Chacun, chacune, retourne dans sa prison.
Dans la grisaille de chaque jour, en classe et surtout dans le dortoir secoué de toux sur une basse continue de ronflements, éclairé par la tente carrée "en abat-jour" ,dans quoi lit et dort le surveillant ,
toi, les yeux grand ouverts dans le noir, 
tu penses à elle ;
Vénus.
Dans ton rêve, des seins lui poussent que tu n’oses même pas imaginer et qui, (eux non plus), ne seront pas de marbre..
Arrive le jour de la communion solennelle. 
C’est un dimanche. Tu as un costume, un vrai,  
le premier.
L’impression d’être un chimpanzé déguisé, il ne te manques que le tambour..
Les chaussures vernies te font mal. 
Ta mère et ta grand-mère ont des chapeaux et des tailleurs pastel,  genre « reine d’Angleterre » .
Toi, tu as,  humiliation suprême, un brassard



C’est un truc genre ruban géant avec un nœud, en satin ou quoi, qui pendouille depuis le long du bras, sur le côté.
"L'inénarrable lambeau de lingerie cléricale" dira superbement Pierre Michon dans ses "Vies minuscules".
On t'a fait une raie sur le côté avec de la brillantine.
et infligé  des gants blancs.
La photo* de l’époque confirme: L’air d’un c…avec le sourire niais qui va avec.

*La vraie, tu ne l'a plus, mais ça ressemblait fichtrement à ça


Dans l’église, c’est le grand barnum avec orgue, sermons et tout le tralala. 
Les pitreries de l'officiant sont au top pour la circonstance.
Il s'agit de canaliser la pensée fragile vers le tunnel du christianisme au bout de quoi, (pour les soumis), il parait, on verra enfin, la lueur..
C’est noir (et blanc..) d’un monde qui va bientôt se déverser sur le parvis. 
A peine si tu l'as aperçue, ta Vénus, de loin, au milieu du groupe des filles qui elles, sont toutes habillées en mariées.
Les familles commencent à se disperser. 
Ta mère laisse entendre qu’on ne va pas tarder à ..
Soudain, une tache blanche grossit dans ton champ de vision.
Elle court entre les groupes qui papotent et se congratulent. 
Une robe en satin blanc , un voile de tulle avec des marguerites en dentelle et au milieu de tout ça,
Vénus.
(Dans tes souvenirs, c’était un peu ça**):





** En vrai, tu risquais pas de la prendre en photo..
Elle s’est échappée du cercle de famille. Elle fonce sur toi et, rouge comme une pivoine, te tends un petit carton. C’est une image pieuse ; celle qu’on fourre dans les missels, avec une sainte et tout, qu’on lui a imprimé pour la circonstance.
Le temps que tu  regardes l’image, sans prononcer un mot, elle a disparu dans un frou-frou de dentelles blanches. 
Ta mère te regarde, interrogative, saisit la carte, esquisse un petit sourire, un rien  ironique.
Pour le coup, c'est toi le bloc de marbre, mais avec aux joues une chaleur, un rose qui doit enluminer le parvis.
Tu ne l’as jamais revue, 
Vénus.
C’était ta première histoire d’amour . 

Elle était déjà finie.